Nicole Voilhes - Auteur de biographies romancées de couples célèbres du XVI siècle.
La mouche

Le Livre

En 1678, poussée par la faim, Marie Saint-Germain vole un petit pain.
Arrêtée et conduite dans les sous-sols sinistres du Châtelet, elle s’attend à être incarcérée quand, à sa grande surprise, le Lieutenant général de la police lui propose de devenir... mouche !
Propulsée dans un monde qu’elle ignore, celui des bas-fonds de la société, Marie va devoir renseigner la police de Louis XIV sur les agissements des alchimistes, des devineresses, des faiseuses d’anges.
Les recettes des élixirs d’amour et des poudres de succession lui deviennent familières comme ceux et celles qui les fabriquent ; les amitiés douteuses et forcées des marginaux et les belles manières des dames de la cour où elle est amenée à fréquenter la marquise de Montespan, conduisent l’héroïne à voir ses contemporains sous un jour qu’elle ignorait.
La mouche va aussi rencontrer l’amour, incarné par un séduisant ange gardien, ce qui lui permet de surmonter les embûches d’une enquête difficile qui entraîne le lecteur au cœur du plus important procès de l’Ancien Régime, mieux connu sous le nom de l’Affaire des Poisons.

Extraits

« La devineresse soupire :
- Ah ! On voit bien que vous n’êtes pas issue du peuple, vous. Dans le quartier, nous avons notre parler et nos coutumes bien à nous...Le roi a fait fermer la Cour des Miracles du fief d’Alby sans se douter qu’un coêsre arrêté en fait naître dix autres pour réorganiser d’autres cours tout autant miraculeuses. Le coêsre, c’est le roi de la cour, il est assisté de ses cagoux, ses lieutenants comme on dirait dans votre monde. Les cagoux surveillent les truands et font régner leur police. Les lapins-ferrés, ce sont les sergents du guet, ces poltrons qui n’osent jamais affronter le peuple des Miracles. Donc, depuis quelque temps, les boutiques des apothicaires sont épiées en permanence et malheur aux ribaudes ou aux devineresses qui chercheraient à s’approvisionner en tue-rats. C’est tellement plus facile d’arrêter une pauvre femme que de s’attaquer aux cagoux !

Marie feint de compatir aux malheurs de la pègre parisienne :
- Je comprends votre souci, Dame Bosse, et si vous pensez que je peux vous être utile, n’hésitez pas à me solliciter.
Marie Bosse, sensible à la proposition, suggère :
- Certes oui, vous pourriez m’aider. Une bourgeoise qui veut tuer les rats de sa cave plus rapidement qu’en s’encombrant de chats, rien n’est plus normal... L’apothicaire vous vendra autant de pierres tue-rats que vous voudrez et si un lapin-ferré vous voit faire vos emplettes, il n’ira pas vous inquiéter. »...

« C’est alors que survient Catherine Montvoisin avec l’agneau du sacrifice : un nouveau-né hurlant et gigotant comme s’il comprenait à quel sort il est voué. L’abbé prend le couteau que lui tend la femme Chanfrain et d’un geste, il tranche la gorge du nourrisson. L’assistante n’a plus qu’à placer le calice sous le jet de sang qui s’écoule dans un silence tel qu’on entend tomber même les dernières gouttes vermeilles.
Marie sent ses jambes flageoler, elle serre les poings pour ne pas crier son dégoût, elle aimerait fermer les yeux pour ne plus voir le sacrilège mais Guibourg n’en a pas fini, il consacre maintenant les hosties et, à l’élévation, c’est l’assistance tout entière qui incline la tête pour honorer le Maître des Ténèbres. Tous, tous semblent adhérer à l’impensable, l’inimaginable. »..

« Le chevalier enveloppe Marie dans sa cape en disant :
- Avez-vous plus chaud ainsi ? Vous sentez-vous mieux ? De grâce, Marie, parlez-moi... Je sais que vous avez vu des choses effroyables ce soir, gardez-en le souvenir jusqu’à demain pour les confier à Monsieur Desgrez, ensuite faites-moi le plaisir d’oublier ces horreurs à tout jamais et de ne garder en mémoire que mes baisers pour vous ranimer.
Piquée, Marie retrouve l’usage de la parole :
- Pouvez-vous m’expliquer pour quelle raison je devrais me souvenir de baisers qui ne m’étaient donnés que dans un but humanitaire ?
- Un but humanitaire ? Tiens donc, je ne me sentais pas de la race des bons Samaritains mais puisque vous le dites...Triple sotte ! Je t’ai embrassée parce que j’en avais envie et comme tu n’as pas eu l’air de détester ce traitement, j’en conclus que je ne te suis pas indifférent. Cela m’arrange plutôt car figure-toi que je suis amoureux d’une petite mouche, une toute petite mouche que j’imaginais seule dans les dangers...Fou d’inquiétude, j’ai galopé jusqu’ici pour te retrouver inanimée. Cette explication te suffit-elle, mon incrédule ? »...

Rencontres avec le Roman La mouche - de Nicole Voilhes
Rencontres

 

Rencontres avec le Roman La mouche - de Nicole Voilhes