Nicole Voilhes - Auteur de biographies romancées de couples célèbres du XVI siècle.
La double vie de la mouche

Le Livre

Marie de Beaudry renoue avec les aventures.
À la demande du marquis d’Argenson, nouveau Lieutenant général de police, elle va enquêter dans les bas-fonds parisiens.
Les temps sont durs en cette fin du 17e siècle, une misère noire frappe le peuple au point que beaucoup de femmes se prostituent pour nourrir leur famille.
Assainir les mœurs n’est pas le but avoué de la monarchie, le roi sait que de nombreux mécontents complotent et se réunissent dans les maisons closes du Marais. À Marie de découvrir ce qui se trame dans les lieux de plaisir.
Cependant, une marquise peut-elle franchir les seuils de débauche ?
Qu’à cela ne tienne ! Marie jouera double jeu, endossera d’autres personnalités que la sienne et fréquentera des gens peu recommandables.
Cependant, en acceptant cette nouvelle mission, elle ne réalise pas qu’il lui faudra mener de front sa vie familiale et ses sorties mondaines, veiller à la bonne marche de son ouvroir comme assurer ses cours à la Maison royale de Saint-Louis créée par la marquise de Maintenon.
Tâche difficile mais exaltante ; au cours de cette troisième enquête, la mort accompagne les pas de Marie qui va apprendre des pratiques amoureuses dont son époux ne l’a jamais entretenue.
Doit-elle en remercier Louis XIV et le marquis d’Argenson ?
Laissons au marquis de Beaudry le soin de lui répondre :
« Je ne t’ai pas épousée pour faire de toi une gourgandine. »

Extraits

1. « Il fait encore nuit noire, Marie se hâte au long de la rue des Francs Bourgeois puis de celle du Temple ; elle sait que de nombreux sergents effectuent des rondes à cette heure indue mais qu’il n’en sera pas de même quand elle abordera les ruelles qui la mèneront à destination, la rue Tireboudin où, dans une maison de modeste apparence, le marquis d’Argenson a loué un appartement pour elle.
Elle a réussi à faire admettre au chef de la police que pour mener à bien sa mission il lui fallait endosser deux personnalités en sus de la sienne : elle serait tantôt Madame de Lamandé, veuve d’un conseiller au Parlement de Rouen, dame aussi pieuse qu’âgée, tantôt son frère cadet, le chevalier du Champart. Au Lieutenant de police assez surpris, elle avait prouvé que si jouer les dames patronnesses auprès des prostituées semblait aisé, en tant que femme elle pouvait difficilement se rendre dans les maisons closes. En conséquence, il lui était nécessaire de trouver dans son logement deux tenues d’homme et une rapière, deux toilettes de dame respectable assorties d’une perruque de cheveux grisonnants. D’Argenson avait souscrit à tout, ancrant ainsi Marie dans l’idée que sa mission dépassait probablement le cadre de ce qu’il lui avait annoncé ; outre des informations sur la prostitution, il souhaitait que la Mouche découvre des faits plus graves...

2. ( Le chevalier du Champart ayant blessé trois adversaires devant la porte d’une maison close, le marquis d’Argenson est venu s’en plaindre à la marquise de Beaudry )
La mouche n’a pas l’intention de s’en laisser conter trop longtemps. Elle toise son visiteur et lui assène une vérité qu’elle se réservait comme principal argument :
- Mais enfin, de quoi vous plaignez-vous, marquis ? Que j’aie blessé le premier au bras droit alors qu’il est droitier et qu’il ne pourra pas se battre avant des semaines ? Que j’aie sectionné le mollet du second, balafré la joue et entaillé la cuisse du troisième ? Que voilà de nobles sentiments ! Ces sbires seront incapables de reprendre du service dans l’armée avant quelques mois ? La belle affaire ! Ils trouveront plus lucratif de surveiller l’Antre de Vénus que d’aller affronter les tirs ennemis et je les comprends... D’Argenson ignore les explications de Marie, il n’a en tête que ses prétendus effrois :
- Enfin, Madame, vous auriez aussi bien pu être tuée...

3. (À l’Antre de Vénus, trois clients ne voulant pas acquitter leur dû, Dame Rose, la tenancière, fait appel au Chevalier du Champart).
Serein, le chevalier décline l’offre de Dame Rose de séjourner plus longtemps à l’Antre de Vénus en prétextant avoir un engagement à respecter sur la rive gauche. Le sourire entendu de la tenancière donnerait à réfléchir si Marie n’était pas rompue maintenant aux préoccupations de la dame qui, en guise d’au-revoir, croit bon d’ajouter :
- Ah ! Sûr que vous êtes un fameux luron, Monsieur le chevalier !
Je parie que vous allez retrouver une dame de la noblesse dans son lit.
Faudra que je dise à Guillemette de mettre plus de cœur à l’ouvrage la prochaine fois, c’est vrai ça ! Faut savoir s’adapter au client ! Ces filles, ça manque d’idées, ça comprend pas l’intérêt de la maison, c’est pourtant simple...Bonne Sainte-Vierge ! Qui est-ce qui m’a fait embaucher une empotée pareille ? J’ai encore eu une crise de bon cœur ce jour-là ! »

4. « Il n’est rien d’aussi effroyable que de penser qu’on vit peut-être sa dernière heure. Marie de Beaudry s’est résignée à assumer sa destinée sans se demander la raison de son sacrifice : certes, elle doit beaucoup au roi et à son épouse mais il lui est arrivé à maintes reprises au cours de la nuit passée sans trouver le sommeil de regretter sa loyauté envers le pouvoir qu’elle ne remettra pas en cause pour autant. Elle a accepté une mission, il lui paraît normal de la mener à son terme.
Maintenant, dans le feu de l’action, elle réalise tout ce qu’elle va perdre pour ne gagner que l’honneur d’avoir tenu son engagement. Fierté ou orgueil ? Elle serait bien incapable d’identifier le sentiment qui l’anime tant elle imagine le désespoir probable des siens quand ils comprendront que l’honneur lui a semblé plus important que l’amour qu’elle leur portait et que celui qu’elle leur inspirait.
Elle épiloguerait sur sa destinée si son attente ne cessait d’un coup... »

Rencontres avec le Roman La double vie de la mouche de Nicole Voilhes
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